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Etude archéologique du verre de la Porte de Mars à Périgueux (Dordogne -France)

Dernière mise à jour : 21 avr. 2023

La Porte de Mars était la porte urbaine principale de l’enceinte antique tardive (début du IVe s. ap. J.-C.) du quartier de la Cité à Périgueux. A l’époque médiévale, cette porte monumentale publique change radicalement de fonction pour devenir un lieu clos. Dans le courant du Xe siècle, un mur est édifié dans le but d'occulter l'ouverture de la porte charretière et devient une résidence fortifiée du XIIIe s. au XVIIIe s.





Il a été recueilli 77 tessons de verre lors de deux fouilles archéologiques de la porte de Mars à Périgueux en 2006 et en 2011. Il s’agit d’un lot de verre peu important et très fragmenté. Le nombre minimum d’individus (NMI) s’élève à 15 objets dont aucun n’est complet. Il s’agit, pour l’ensemble, de tessons appartenant à de la vaisselle domestique. Il n’a été trouvé qu’un seul tesson de verre plat. Ces tessons datent de périodes différentes. Quelques-uns sont de l’époque gallo-romaine, d’autres dateraient du XIVe siècle.


Le matériel en verre date de deux périodes : des IIe/VIe siècles et du XIVe siècle


La verrerie du IIe siècle au VIe siècle

Balsamaires

Deux fragments (1 et 2) proviennent de balsamaires. Le premier est un fragment de panse qui peut être celle d’un balsamaire à panse aplatie de type Isings 82b2. Il est de couleur bleu/vert. Il s’agit de fioles à parfum qui ont été largement diffusées à partir du IIe siècle. Ce type d’objet a été découvert à Poitiers lors des fouilles de la nécropole des Dunes (tombe 5)[1].

Le deuxième qui est le fond rentrant d’une petite fiole dont le verre de couleur verte est très filandreux. Ce fragment étant de trop petite taille, il est impossible d’en donner le type exact ni la datation.

Verre à panse cylindrique de type Isings 108

Le pied n° 3 de couleur bleu/vert appartient à un verre à panse cylindrique de type Isings 108. Il se caractérise par un pied façonné dans la masse obtenu par pincement et refoulement du fond de l’objet. Il s’agit d’un verre à boire de type Isings 108. Ce type d’objet est très courant au IIIe siècle. Des exemplaires ont été trouvés dans la nécropole des Dunes à Poitiers[1], en Gironde dans la villa gallo-romaine de Loupiac[3] et sur le site de Jau Dignac[2].


Gobelets coniques de type Isings 106/AR 66 ou bol de type Isings 96/AR 60

Les fragments n° 4 et 5 peuvent appartenir à des gobelets coniques de type Isings 106 / AR 66 ou à des bols de type Isings 96/ AR 60. Ces deux types se caractérisent par une lèvre coupée au ciseau, laissée brute, à peine meulée.

Le premier type date des IIIe /IVe siècles et il est encore utilisé au Ve siècle. C’est un type de verre très répandu au IVe siècle qui a aussi été utilisé comme luminaire[1]. Ce genre de verre a été trouvé en Aquitaine à Jau-Dignac (Gironde)[2], à Bordeaux, Place Camille Julian [7] et lors des fouilles de la cité judiciaire[8], dans les Deux-Sèvres à Rom[6].


Le type Isings 96/ AR 60 est daté du IVe siècle en Aquitaine. Des exemplaires ont été trouvés à Jau-Dignac[2], dans la villa de Plassac et place Camille Julian à Bordeaux[7].


Gobelets de type Isings 109/Feyeux 40

Les deux fragments de bord supérieur n° 6 et 7 blanchâtre/jaunâtre peuvent appartenir au type Isings109/Feyeux 40. Il s’agit de verre à boire réalisé avec une seule paraison. Leur lèvre est arrondie par réchauffement de la paraison sur la flamme. Le fragment n° 7 est un bord supérieur ayant dans sa partie haute quatre négatifs de filets de verre. Souvent, il s’agit de filets de verre blanc de moins bonne qualité que le reste de l’objet et qui se sont décomposés lors de leur enfouissement.

C’est un type de verre qui s’est répandu dans toute l’Europe entre le IVe et le VIe siècle avec des formes plus ou moins élancées. Ceux ornés de filets de verre rapportés sont plutôt datés des Ve/VIe siècles. Ce type de verre a été retrouvé à Jau-Dignac[2], à Plassac[8], à Bordeaux Place Camille Julian[4], ou lors des fouilles de la cité judiciaire[5], et à Rom (Deux-Sèvres)[6].

Un autre tesson de couleur blanchâtre provenant aussi de l’US 2056, possède aussi un négatif de filet de verre. Il s’agit d’un fragment de panse d’un verre dont le type ne peut pas être déterminé à cause de la petite taille du tesson.


Bols de type indéterminé

Deux fragments de bord supérieur n°8 de couleur vert olive et le n° 9 appartiennent à des bols. La couleur du tesson n° 9 ne peut pas être déterminée car le verre est très altéré. Il est impossible de déterminer les types de ces deux objets à cause de la petite taille des tessons qui ne donnent pas assez d’indices. Il en est de même pour l’anse de couleur verte (n° 10 de l’US 1016). Elle peut aussi bien appartenir à un bol qu’à une bouteille.

[1] Simond-Hiernard 2000

Simon-Hiernard D., Verres d’époque romaine, collection des Musées de Poitiers, Poitiers, 313-316. [2] Hébrard-Salivas 2008

Hébrard-Salivas C., Etude du verre, Villa Gallo-romaine de Loupiac, MARIAN J., Rapport Final d’Opération, SRA, Bordeaux. [3] Hébrard-Salivas 2008

Hébrard-Salivas C., Etude du verre du site de Jau-Dignac, Jau-Dignac et Loirac (Gironde) « La chapelle Saint-Siméon », Cartron I., Castex D., Rapport Final d’Opération, SRA, Bordeaux, 2008. [4] Hochuli-Gysel 1995

Hochuli-Gysel A., le verre en Aquitaine du IVe siècle au IXe siècle, un état de la question, Le verre de l’Antiquité tardive et du haut Moyen Age, Typologie-Chronologie-Diffusion, Guiry-en-Vexin, 159-176. [5] Simon 2008

Simon L., Le verre antique, La cité judiciaire (Sireix C. dir), Aquitania, supplément 15, Bordeaux, 325-345. [6]Dubreuil 1995

Dubreuil F., La verrerie d’époque romaine à Rom (Deux-Sèvres), Aquitania, XIII, 135. [7] Hochuli-Gysel 1996

Hochuli-Gysel A., La verrerie du Sud-ouest de la Gaule, IVe-VIe siècle, Aquitania, 231-236. [8] Hochuli-Gysel 1990

Hochuli-Gysel A., Les verres de la villa gallo-romaine de Plassac, Revue Archéologique de Bordeaux, 39-81.






II- Les objets en verre du XIVe siècle


Les verres de cette période sont représentés par quelques tessons très altérés de couleur noirâtre. Certains font apparaître un verre de couleur jaunâtre ou verdâtre. Quelques identifications de forme ont pu être faites : verres à boire, fioles, burette.


Verre à tige pleine


L’objet n°11 est un fragment de tige pleine torsadée d’un verre à boire. Celle-ci de couleur brunâtre due à l’altération, comporte une bague de 4mm d’épaisseur en verre plein. Elle est réalisée avec un filet de verre enroulé autour de la tige puis légèrement façonné et aplati à la pince. Elle sert à faciliter la préhension du verre.

Cette tige est caractéristique de verres côtelés du XIVe siècle formés de trois paraisons : une pour le contenant côtelé, une pour la tige en verre plein, une pour le pied soufflé à la volée. Ce type de verre a été trouvé lors des fouilles du château de Commarque (Dordogne) en 2002[1], à Paris, à Saint Denis dans le quartier de la basilique[2], dans la cour Napoléon du Louvre[3], à Metz (Moselle)[4], à Toulouse[5], et à Orléans[6]. On le retrouve aussi en Angleterre, Pays- Bas et Belgique.


Verres à tige creuse

Une jambe complète et un fragment de pied ourlé par refoulement de la paraison correspondent à des verres à boire réalisés avec une seule paraison (n°12 et 13). Le verre est noirâtre et très dégradé.

Des verres identiques ont été trouvés lors des fouilles du château de Commarque, d’autres se trouvent au Musée du Périgord dans la collection Maap et ont été trouvés au pied du mur gallo-romain des arènes de Périgueux. A Bordeaux, des pieds identiques ont été trouvés lors des fouilles du Cours du Chapeau Rouge[7].



Le verre à boire n°14 correspond à un verre ayant une tige creuse et un contenant côtelé. Des verres identiques ont été trouvés lors des fouilles du cours du Chapeau Rouge[7]. Tous ces verres peuvent être datés du XIVe siècle.




Les fioles et burette


Cinq fragments appartiennent à des fioles ou burette (n°15 à 19). Seuls deux fragments permettent de voir leur couleur d’origine : jaunâtre ou verdâtre. Les fioles avaient le fond rentrant et il est possible de voir la trace de reprise du pontil. Un goulot presque complet mesure plus de 12 cm.

Il a été trouvé aussi un fragment d’un bec verseur qui indique la présence d’une burette. Ces objets qui sont aussi très dégradés datent de la même période, XIVe siècle.







Analyses chimiques

Cinq fragments ont été analysés par spectrométrie de masse à plasma avec prélèvement par ablation laser (LA-IC-MS), effectuée à IRAMAT-CEB (Orléans)[8]. Il n’y a que deux de ces fragments qui ont donné des résultats (n° 17 et n° 18). Les trois autres étaient trop corrodés et les résultats ne sont pas significatifs (n°11, n°12, n° 14).

Les verres n° 17 et n° 18 sont des verres potassiques. C'est-à-dire que le fondant utilisé pour réalisé le verre provient de cendres végétales comme les cendres de fougère ou de hêtre. Il n’y a que dans le sud de la France que les verres deviennent sodiques à partir du XIVe siècle. La composition des verres analysés est conforme aux datations proposées.


[1] Pousthoumis- 2004

Pousthoumis B., Château de Commarque, les castrum de Commarque, rapport de fouilles, SRA, 2004, [2] Meyer 1989

Meyer N., n° 156, verre côtelé à tige pleine torsadée, A travers le verre, du Moyen Age à la Renaissance, Rouen, 210. [3] Barrera 1990

Barrera J., Le verre à boire des fouilles de la cour Napoléon du Louvre (Paris), Annales du 11ème congrès de l’association internationale pour l’histoire du verre, Amsterdam, 347-365. [4] Bourger-Cabart 1990

Bourger I., Cabart H., La céramique et le verre de deux ensembles clos des XIVe et XVIe siècles à Metz (Moselle), Revue Archéologique de l’Est et du Centre Est, 105-140, Fig. 8, n° 31. [5]Reverdy 1990

Reverdy S., Verrerie à l’ancien Hôpital Larrey (Toulouse), Barrère M., et Rey-Delqué M. (dir.), Archéologie et vie quotidienne aux XIIIe-XIVe siècles en Midi-Pyrénées, Toulouse, 186-191. [6] Barrera 1987

Barrera J., Archéologie de la ville, Orléans3, Revue archéologique du Loiret, n°18. [7] Hébrard-Salivas 2014

Hébrard-Salivas Catherine, L'activité verrière dans le quart sud-ouest de la France : production, consommation, commercialisation, Thèse de doctorat, 2014. [8] Je remercie chaleureusement Bernard Gratuze, Directeur de recherches, IRAMAT, centre Ernest Babelon, UMR 5060, CNRS/Univ.d’Orélans, pour la réalisation de ces analyses.




Conclusion


Le nombre de tessons retrouvés est peu important. De plus ce lot est très fragmenté et le verre s’est parfois mal conservé. Malgré tout, ces tessons nous apportent des informations sur l’occupation du site. Deux périodes apparaissent bien distinctement : période IIIe/IVe s., période médiévale (XIVe siècle).

Quelques formes ont pu être identifiées comme les formes Isings 96 (AR 60), 106 (AR 66), 108, 109 (Fey. 40). Il s’agit de formes communes, fréquemment retrouvées sur les sites d’habitat.

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